Imaginons un projet immobilier familial, une envie d’investir à plusieurs ou encore le besoin de mieux organiser la transmission d’un patrimoine. Dans ces contextes, la création d’une Société Civile Immobilière (SCI) s’impose souvent comme une solution pertinente. Mais par où commencer ? Comment transformer une idée en structure juridique opérationnelle ? La SCI permet d’acquérir et de gérer un ou plusieurs biens immobiliers en commun, en dehors du cadre de l’indivision. Elle facilite la gestion, optimise la transmission et peut même servir à structurer un investissement locatif. Pourtant, avant d’en récolter les bénéfices, encore faut-il bien en comprendre les étapes de création. Voici un guide complet pour franchir chaque étape de manière éclairée pour créer une SCI.
Avant même de parler de statuts ou de démarches administratives, la première étape consiste à s’accorder sur les fondements de la SCI : son objet social et la composition de l’équipe fondatrice. Ces choix sont déterminants, car ils auront un impact direct sur la gestion future de la société, ses relations internes, et sa cohérence juridique. Il s’agit donc de poser des bases solides pour éviter les blocages ou conflits à moyen et long terme.
L’objet social d’une SCI décrit l’activité principale de la société. Il est généralement centré autour de la détention, la gestion ou la mise en location de biens immobiliers. Il doit être rédigé avec précision afin d’encadrer juridiquement les actions de la société et d’éviter toute ambiguïté en cas de contrôle administratif, de litige entre associés ou d’opérations spécifiques (vente, apport, transformation…).
Voici quelques exemples typiques d’objet social :
- l’acquisition, la gestion et l’entretien d’un patrimoine immobilier locatif,
- la mise à disposition à titre gratuit d’un bien immobilier à un membre de la famille,
- l’achat puis la revente d’un bien dans le cadre d’une stratégie patrimoniale à moyen terme.
Un objet social trop vague peut poser problème lors de l’immatriculation ou en cas de contentieux. À l’inverse, un objet trop restreint pourrait limiter les possibilités d’évolution ou obliger à modifier les statuts à la moindre opération hors périmètre initialement prévu. Il est donc conseillé de rédiger un objet social suffisamment souple tout en restant conforme à la nature civile de la SCI (à noter qu’une SCI ne peut exercer une activité commerciale, sauf exceptions très encadrées).
Choisir les associés
La SCI doit être composée d’au moins deux associés, qu’il s’agisse de personnes physiques ou de personnes morales. Ces associés peuvent être membres d’une même famille (parents, enfants, conjoints), des amis, des partenaires professionnels ou même des structures juridiques comme une société ou une association.
Chaque associé contribue à la constitution du capital social, que ce soit par un apport en numéraire (somme d’argent), en nature (bien immobilier, mobilier ou autre), ou exceptionnellement en industrie (compétences ou services, rarement utilisé en SCI). En contrepartie, il reçoit des parts sociales proportionnelles à son apport, qui déterminent ses droits en matière de vote et de participation aux bénéfices.
Voici quelques critères à prendre en compte pour bien choisir ses associés :
- Leur vision patrimoniale ou financière à court, moyen et long terme,
- Leur capacité d’investissement initiale et leur éventuelle contribution future,
- Leur niveau d’implication dans la gestion quotidienne de la SCI,
- La qualité de la relation personnelle ou professionnelle entre les associés,
- Leur situation fiscale, familiale et leur lieu de résidence (utile en cas de transmission ou de fiscalité internationale).
Il est judicieux de prévoir dès le départ un pacte d’associés (en annexe des statuts) pour clarifier les règles de fonctionnement, d’entrée et de sortie, ou de résolution des différends.
Parfois, un tableau vaut mieux que mille mots :
Objet social | Choix des associés |
---|---|
Définit l’activité principale de la SCI : gestion, détention ou location de biens immobiliers. | Identifie les membres fondateurs de la SCI : au minimum deux, personnes physiques ou morales. |
Doit être rédigé clairement et précisément, sans ambiguïté juridique. | Les associés doivent partager une vision commune du projet immobilier et de la gestion à long terme. |
Un objet trop restreint peut limiter les opérations futures ; trop large, il peut être contesté. | Leur répartition en parts sociales détermine les droits de vote et la répartition des bénéfices. |
Peut prévoir des activités diverses comme la mise à disposition d’un bien ou la revente. | Il est conseillé de rédiger un pacte d’associés pour cadrer les engagements de chacun. |
Influence la fiscalité applicable et les possibilités d’option (IR ou IS). | Des relations claires et équilibrées entre associés favorisent la stabilité et la réussite du projet. |
Rédiger les statuts et effectuer les démarches légales
Une fois les bases définies, place à la rédaction des statuts de la SCI. Ce document constitue le socle juridique de la société : il en définit les règles de fonctionnement, de répartition des pouvoirs, et précise le rôle du gérant.
Les éléments obligatoires des statuts d’une SCI
Les statuts constituent le socle juridique de la SCI. Ce document fondateur organise la vie de la société et détermine les droits et obligations des associés. Sa rédaction ne doit donc rien laisser au hasard, car il engage durablement l’ensemble des parties prenantes. Plusieurs mentions sont légalement obligatoires pour que les statuts soient valides au moment de l’immatriculation de la société :
- La dénomination sociale : il s’agit du nom de la SCI, librement choisi, mais qui ne doit pas être déjà utilisé par une autre société.
- La durée de vie de la société : elle est fixée pour une période maximale de 99 ans, avec possibilité de prorogation.
- L’adresse du siège social : c’est l’adresse administrative et juridique de la SCI. Elle peut être fixée au domicile du gérant ou dans un local dédié.
- Le montant du capital social : il peut être fixe ou variable, constitué d’apports en numéraire, en nature ou exceptionnellement en industrie.
- Les modalités de souscription des parts sociales : elles précisent la répartition des parts entre les associés selon leurs apports respectifs.
- Les règles de fonctionnement : elles couvrent les pouvoirs du gérant, les conditions de convocation des assemblées générales, les modalités de vote et les règles encadrant la cession ou la transmission des parts.
Les statuts peuvent être rédigés sous seing privé, notamment lorsque les apports sont uniquement en numéraire. En revanche, s’il y a apport d’un bien immobilier, la rédaction devra obligatoirement être faite par acte notarié. Dans tous les cas, il est fortement recommandé de se faire accompagner par un professionnel (notaire, avocat spécialisé ou expert-comptable) afin de garantir la conformité des statuts et leur adaptation aux objectifs des associés. Ainsi, pour récapituler, voici les éléments obligatoires ainsi que leur rôle :
Élément obligatoire | Rôle ou impact dans la vie de la SCI |
---|---|
Dénomination sociale | Identifie légalement la société ; elle doit être unique, distinctive et vérifiable via l’INPI ou les greffes. |
Durée de la société | Fixe la limite légale d’existence (jusqu’à 99 ans) et permet d’anticiper un éventuel renouvellement ou une dissolution programmée. |
Adresse du siège social | Lieu de réception des courriers officiels, de domiciliation fiscale et de convocation des assemblées. Modifiable en cours de vie sociale. |
Capital social | Représente les ressources initiales de la société ; peut être symbolique ou élevé, en capital fixe ou variable selon les projets. |
Souscription des parts | Définit les apports des associés (numéraire, nature, industrie) et répartit les droits sociaux et financiers. |
Règles de fonctionnement | Organise la gouvernance de la SCI : rôle du gérant, prises de décision, droits de vote, gestion des cessions de parts. |
Immatriculer la SCI : Comment procéder
Après signature des statuts, plusieurs démarches administratives sont à réaliser pour que la SCI soit légalement constituée :
- Publication d’une annonce légale de constitution dans un journal habilité.
- Dépôt du dossier d’immatriculation sur le site du guichet unique (ex-Greffes). Le dossier comprend :
- un exemplaire des statuts signés,
- le formulaire M0 complété,
- une attestation de parution de l’annonce légale,
- un justificatif de domiciliation,
- les pièces d’identité des associés et du gérant.
Une fois le dossier validé, un extrait Kbis est délivré : la SCI est officiellement immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS).

Check-list des actions à entreprendre
Gérer et organiser la vie de la SCI
Créer une SCI n’est que le début. Pour qu’elle fonctionne efficacement, il faut en assurer la gestion quotidienne et respecter certaines obligations légales et comptables.
Le rôle du gérant d’une SCI
Le gérant, désigné dans les statuts ou par décision des associés, représente légalement la SCI. Il peut être un associé ou un tiers. Ses missions incluent :
- la gestion des biens immobiliers,
- la signature des baux,
- la tenue de la comptabilité (même simplifiée),
- la convocation des assemblées générales annuelles,
- la déclaration des revenus de la SCI.
Il est important que ses pouvoirs soient bien encadrés dans les statuts afin d’éviter les abus ou les conflits d’intérêt.
Les obligations fiscales et comptables de la SCI
La SCI, en tant que structure civile, bénéficie d’une certaine souplesse fiscale. Par défaut, elle est soumise à l’impôt sur le revenu (IR), ce qui signifie que ce ne sont pas les bénéfices de la société qui sont directement imposés, mais les revenus perçus par chaque associé, proportionnellement à leur part dans la société. Cela permet une fiscalité transparente, souvent avantageuse dans le cadre de la détention familiale ou patrimoniale.
Toutefois, il est également possible d’opter pour l’impôt sur les sociétés (IS). Dans ce cas, la SCI est traitée comme une entité fiscale indépendante : elle est imposée sur ses propres bénéfices au taux de l’IS, et les associés ne sont fiscalisés que lors du versement des dividendes. Cette option peut être avantageuse dans certains cas, notamment en présence de charges importantes, d’un projet de réinvestissement ou d’une stratégie de capitalisation sur le long terme.
Au-delà de la fiscalité, les obligations comptables varient également selon le régime choisi. Une SCI à l’IR peut se contenter d’une comptabilité de trésorerie, simplifiée, mais qui doit néanmoins rester cohérente et organisée. À l’inverse, une SCI soumise à l’IS est tenue d’établir une comptabilité commerciale complète, avec bilan, compte de résultat et annexe, ainsi que de déposer ses comptes annuels. Voici pour conclure un tableau comparatif des deux régimes pour mieux comprendre leurs implications :
Régime fiscal | Détails et impacts |
---|---|
Impôt sur le revenu (IR) |
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Impôt sur les sociétés (IS) |
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C.S.